Hong Kong est l’un des territoires les plus densément peuplé et les plus urbains de la planète. Il compte même sur son territoire Mong Kok, district considéré comme le lieu ayant la plus grande densité de population au monde allant de 150 000 à 200 000 habitants par kilomètres carrés.
Naitre et grandir dans un environnement aussi urbain implique une déconnexion vis-à-vis de la terre. Ainsi depuis quelques années, pour recréer ce lien à la terre, se développe un grand réseau d’agriculture urbaine et de jardins partagés. On retrouve à travers tout le territoire des aires où chacun dispose de sa parcelle pour cultiver ses propres légumes et herbes aromatiques. Les bienfaits de ces jardins sont nombreux : interactions sociales, contacts avec la nature, éducation des plus jeunes.
Pour en savoir plus, nous sommes allés à la découverte de cinq de ces lieux aux caractéristiques variées.Le premier se situe dans le district de Causeway Bay sur le toit du building Hysan Place qui comporte un grand centre commercial de plusieurs étages ainsi que des bureaux. Ce bâtiment de 204 mètres de hauteur construit en 2012 peut se vanter grace à ces certifications nationales et internationales d’être le premier « green building » (bâtiment écoresponsable) de Hong Kong. Il doit cela à un système de ventilation d’air évitant l’usage de la climatisation, un agencement des fenêtres favorisant la lumière naturelle à la lumière artificielle, un traitement des eaux usées avec des plantes (phyto-épuration) ainsi qu’une grande ferme urbaine sur le toit.
« Causeway Bay est un quartier très densément peuplé. Si les gens veulent pouvoir cultiver, ils sont obligés d’aller très loin, jusque dans les nouveaux territoires. Désormais, ils ont juste à prendre le métro. » nous explique Konnie Yu, la « Corporate Sustainability Manager » (Responsable des projets durables) du building. Les fermiers urbains deviennent donc membres pour trois mois et disposent d’une parcelle pendant cette durée. C’est notamment le cas de Steven et Joe, employés chez Apple, qui ont leurs bureaux dans le bâtiment. Ils viennent le midi, deux fois par semaine, pour s’occuper de leur parcelle. Konnie nous confie que la liste d’attente pour réserver une parcelle est très longue et qu’ils accompagnent leurs membres du mieux qu’ils peuvent pour leur apprentissage du potager.
Dans une volonté pédagogique, ils reçoivent régulièrement des sorties scolaires afin d’expliquer concrètement comment se développe ce que nous mangeons. Un moment très enrichissant pour les jeunes Hongkongais !Le second est situé sur la péninsule de Kowloon et se fait appeler Urban Oasis (l’oasis urbaine). Fondé en 2012 par la plus grande communauté chrétienne de Hong Kong, il dispose de 350 parcelles qui sont louées pour six mois.
Sharon, l’une des responsables du jardin communautaire, nous explique que leurs deux objectifs principaux sont de pallier les problèmes de logements exigus de Hong Kong et de permettre aux membres de leur communauté de se rencontrer en faisant des activités collectives. Néanmoins, cette initiative résulte aussi d’une volonté écologique : « les gens des alentours peuvent produire leur propre nourriture et ainsi réduire leurs emissions de CO2 liés aux transports des denrées qu’ils achètent au supermarché. » .Le troisième se situe au sein du Paradise Palace, une résidence pour les gens aisés comme on en trouve souvent en Asie du Sud. Ce sont des lieux clos très sécurisés où les résidents peuvent satisfaire tous leurs besoins sans sortir de la résidence. On y trouve, entre autre, restaurant, magasin, piscine et salle de sport.
Au bord du parking de la résidence rempli de voiture de luxe se trouve un petit couloir avec une trentaine de petites parcelles. Ce ne sont pas les habitants de la résidence qui en profitent mais leurs domestiques qui cultivent pour leur propre consommation. Comme Anna et Joy que nous rencontrons dans le jardin, les domestiques sont le plus souvent des immigrés philippines et indonésiennes car elles sont moins bien payées que les Hongkongais. Elles vivent chez leurs employeurs, souvent dans des conditions précaires, et envoient de l’argent à leur famille.
Rachel de la fondation SEED (Sustainable Ecological Ethical Development) accompagne la tenue du jardin et donne des conseils aux utilisateurs. A propos des domestiques immigrées, elle nous confie : « C’est intéressant pour nous car elles nous font profiter de l’expérience paysanne qu’elles ont acquis dans leur pays d’origine.Le quatrième jardin partagé est sur le continent, au bout de la péninsule de Kowloon, et se trouve sur le toit du centre commercial The Mills. Ce sont des jeunes travaillant autour qui louent des parcelles et s’y retrouve le midi pour jardiner. L’ambiance y est joyeuse en particulier le jour de la récolte où chacun découvre et emporte chez lui ce qu’il a pris le temps de faire pousser pendant plusieurs mois.Le dernier lieu, situé dans le district de Tsuen Wan, ne néglige pas les bienfaits écologiques et éthiques de l’agriculture urbaine. Néanmoins, l’organisme de bienfaisance à l’origine de la création du jardin met les liens sociaux au coeur de sa démarche. En effet, ce jardin communautaire est réservé aux personnes âgées de plus de soixante ans, unique en son genre à Hong Kong selon les responsables du lieu. L’ambiance y est agréable et tout le monde semble s’y connaitre.Le mouvement citoyen des jardins partagés est né à New York et au Canada, depuis il s’exporte à travers toute la planète grace à ses vertus écologiques, sociales et pédagogiques. Hong Kong se l’est particulièrement bien approprié avec des jardins variés à travers tout son territoire.
De nombreux chercheurs étudient le phénomène dans le monde et dans l’ancienne colonie britannique. Ils se plaisent à imaginer que, dans plusieurs décennies, le territoire le plus urbain au monde aura renoué avec la nature et deviendra une cité verte.