MARTIN BERTRAND

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Quel avenir pour la Rance ?

Dans le Nord Est de la Bretagne, un fleuve dessine une splendide vallée avant de se jeter dans la Manche entre les villes côtières de Dinard et Saint-Malo. Permettant de pénétrer une grande partie de la région, il est à l’origine du développement historique du territoire et de villes médiévales comme Dinan. Il s’agit de la Rance. Son patrimoine naturel classée en zone Natura 2000 est le point de départ de nombreuses activités économiques, touristiques et de plaisance. Tous les habitants du coin ont des histoires avec ce fleuve depuis leur plus tendre enfance.

Aujourd’hui, la Rance fait face à un problème majeur qui échauffe particulièrement les esprits de ses riverains : l’envasement ; au point qu’on s’interroge sur la pérennité du fleuve. Cette sédimentation s’accélère d’année en année. Les paysages fluviaux changent. Ce qui furent des plages de sable blanc deviennent de grands amas de vases d’une monochromie austère. Il devient de plus en plus compliqué de naviguer sur le fleuve. Certains bateaux s’échouent, surpris par le niveau anormalement élevé du lit fleuve.

Le responsable de cet envasement paraît évident pour beaucoup d’habitants. Il s’agirait de l’Usine marémotrice de la Rance et en particulier son exploitant, EDF. Un ouvrage unique au monde inauguré par le Général de Gaulle en 1966. Par son altération du système des marées, l’usine, appelé communément « barrage de la Rance » serait la cause de l’accélération de la sédimentation du fleuve.

Pour mieux comprendre les enjeux de cette problématique environnementale que traverse le territoire, je me suis entretenu avec Didier Lechien, Maire de Dinan et Président du Parc naturel régional Vallée de la Rance – Côte d’Émeraude.

La question de l’envasement de la Rance est un sujet qui préoccupe sur le territoire. Quelle est votre regard de la situation ?

L’envasement de la Rance s’aggrave et s’accélère. Cœur Émeraude {NDLR : entité antérieure à la création Parc naturel régional Vallée de la Rance – Côte d’Émeraude}, qui a longtemps porté ce dossier, avait réussi à mobiliser les acteurs, mais force est de constater que les solutions tardent. Le barrage de la Rance est un facteur aggravant de cet envasement. Il y a peut-être des causes naturelles, mais il est évident que la modification du cycle des marées par l’usine marémotrice joue un rôle majeur dans ce phénomène.

Concrètement, pensez-vous que cet envasement aurait lieu sans le barrage ?

Sans doute, mais dans une moindre mesure. Le barrage modifie le flux naturel des marées et empêche l’évacuation naturelle des sédiments. Un rapport récent aux États-Unis a d’ailleurs mis en évidence l’impact de ce type d’ouvrage sur l’envasement des fleuves.

L’usine marémotrice produit de l’énergie verte, n’est-ce pas un atout ?

Oui, c’est une source d’énergie propre qui utilise le cycle des marées. Mais le problème est que, lors de sa construction, on n’a pas pris en compte les conséquences environnementales à long terme. Aujourd’hui, nous sommes confrontés à une situation bloquée, car le coût du désenvasement est très élevé.

Justement, quelles seraient les solutions pour faire face à cet envasement ?

Il faudrait mobiliser des moyens financiers considérables. Une piste serait de revoir la tarification de l’électricité produite par l’usine marémotrice et de l’intégrer dans un cadre de tarification verte, afin d’obtenir des fonds pour financer le désenvasement. Aujourd’hui, le port de Dinan est directement menacé, car si l’envasement continue, les bateaux ne pourront plus y accéder.

Certains élus craignent que parler trop de l’envasement nuise à l’attractivité touristique de la Rance. Qu’en pensez-vous ?

Il faut être vigilant à ne pas réduire la Rance à un “champ de vase”. C’est un fleuve magnifique, avec un patrimoine exceptionnel. Mais il est vrai que si nous ne faisons rien, un jour, on ne parlera plus que de cela.

Vous avez rencontré plusieurs ministres et responsables sur ce dossier. Quels blocages avez-vous identifiés ?

Le principal blocage vient de Bercy. Le ministère de l’Économie freine toute modification de la tarification de l’électricité produite par l’usine. EDF, de son côté, doit assurer la navigabilité du fleuve, mais les actions entreprises restent insuffisantes.

Pensez-vous qu’il y aura une issue positive à cette situation ?

Je veux y croire. Nous ne devons pas nous démobiliser. Il en va de la préservation de notre fleuve pour les générations futures. Si nous n’agissons pas, nous laisserons à nos enfants un territoire dégradé. Le combat continue.

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